La pilule contraceptive a donné aux femmes un contrôle inédit de leur fertilité inédit dans l’histoire et dans l’évolution. Mais son rôle se limite-t-il à cette autonomie sexuelle ? Un nombre croissant de recherches suggèrent que la pilule affecte également la sélection des partenaires mâles, et deux chercheurs de l’Université de Sheffield (Royaume-Uni), Alexandra Alvergne et Virpi Lummaa, viennent de passer en revue ces travaux.
Les femmes ne sont fertiles que dans une brève période entourant l’ovulation. Dans des conditions naturelles, c’est-à-dire notamment sans contraception ni cosmétique, on a montré que cette période fertile se traduit par des modifications physiologiques, comportementales, cognitives et perceptives. Non seulement chez la femme fertile, mais chez les hommes amenés à la fréquenter. Ainsi, en période fertile, les femmes expriment en moyenne une préférence plus prononcée pour les hommes aux traits plus masculins (forme du visage et du corps, pilosité, gravité de la voix, etc.) et à la position plus dominante. Chez les hommes, on observe diverses modifications comme une jalousie plus prononcée et un accès de « compétitivité » sexuelle. Ces manifestations ne sont bien sûr pas systématiques (observables chez tous les hommes et les femmes), mais statistiques (observables en tendance, dans une population d’hommes et de femmes).
De telles modifications sont liées aux variations des hormones (et éventuellement des phéromones). Or, la pilule contraceptive vient bien sûr modifier le fonctionnement habituel du système endocrinien. Et de fait, plusieurs études ont montré que le comportement des femmes prenant un contraceptif oral diffère de celui des femmes n’en prenant pas. Un point particulièrement intéressant concerne la reconnaissance génétique. Les femmes en phase fertile ont naturellement tendance à préférer des partenaires génétiquement plus éloignés d’elles (notamment les gènes du système HLA), un phénomène qui s’observe aussi dans le monde animal. Il se pourrait que cette préférence disparaisse avec la pilule, ce qui ne serait pas totalement sans conséquence sur la fertilité finale des individus et la survie en bonne santé de leur descendance. «La question ultime faisant sens pour l'évolution est de savoir si l’usage des contraceptifs au moment du choix du partenaire peut avoir des conséquences à long terme sur la capacité des couples à se reproduire», soulignent les auteurs.
Référence : Alvergne A., V Lumma (2009), Does the contraceptive pill alter mate choice in humans?, Trends in Ecology & Evolution, e-pub, doi:10.1016/j.tree.2009.08.003
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