Les molly (Poecilia sp.) sont des poissons appréciés des aquariophiles et des biologistes, mais ces derniers analysent leurs comportements plutôt qu’ils admirent leur parure. Martin Plath et ses collègues ont étudié une espèce de l’Atlantique (P. mexicana) dans ses parades amoureuses. Lorsque le molly mâle est laissé seul en compagnie de femelles, il exprime sa préférence pour l’une d’elles. Mais lorsque l’on introduit d’autres mâles, notre poisson devient nettement plus méfiant. Soit il cesse ses parades, soit il commence à séduire une autre femelle que celle ayant sa préférence initiale. Pour les chercheurs, il s’agit d’un comportement de tromperie visant à éviter le coût d’une compétition du sperme. Les mâles Molly sont en effet connus pour se copier les uns les autres. Dans le cas de la reproduction, montrer sa préférence réelle à un compétiteur accroît le risque que celui-ci courtise la même belle. Cet exemple rappelle que la sélection sexuelle joue dans l'histoire du vivant un rôle considérable, quoique longtemps méconnu par rapport à la sélection naturelle, et que ses pressions adaptatives concernent aussi bien les facultés cognitives des organismes.
Référence :
Plath M. et al. (2008), Male fish deceive competitors about mating preferences, Current Biology, online pub.
Illustration : FishBase (DR).
vendredi 1 août 2008
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Autre interpretations des seuls faits rapportes:
RépondreSupprimer1- la preference marginale change parce que la femelle preferee mais deja seduite, autrefois "acquise" ne l'est plus, tandis que la femelle moins preferee mais plus recalcitrante, qui autrefois monopolisait l'attention, n'est plus si importante.
2- les males sont capables de se juger l'un l'autre sur l'echelle d'attractivite, et le moins seduisant lache la meilleure proie pour eviter une concurrence sans issue avec le nouveau venu.
Ces deux effets combines peuvent (ou non) expliquer les phenomenes observes, sans supposer que les poissons aient develope une logique epistemique suffisante pour que la tromperie ait un sens.
1. Cela n'explique pas pourquoi le comportement est observé en présence d'un autre mâle, au lieu d'être constant avec ou sans compétiteur.
RépondreSupprimer2. Cela suppose des capacités encore plus étonnantes chez ce poisson (être capable de se juger soi-même et un autre sur une échelle commune, le jugement de soi étant le plus problématique).
1- mais si! en absence de competiteur, vous n'aurez aucun souci pour vos chasses gardees, et vous concentrerez sur de nouvelles sources de revenus. Une fois la competition presente, vous vous replierez sur vos fondamentaux pour garder vos sources les plus precieuses.
RépondreSupprimer2- il n'est pas difficile de se comparer a l'autre: a- est-il plus gros que moi? b- la femelle est-elle plus excitee en sa presence qu'en la mienne? Aucun besoin de modele cognitif complexe. Le mensonge, au contraire, suppose que l'autre justement ait un modele cognitif complexe, que l'on essaierait de manipuler.
1. Dans ce cas, avec la compétition, le mâle devrait protéger sa favorite (= acquis le plus précieux)... ce qui est justement le contraire du fait observé.
RépondreSupprimer2. La tromperie n'est pas si complexe : je ne pense pas qu'il faut l'entendre chez le molly comme l'effet d'une "théorie de l'esprit", simplement une diversion (un module du genre "si autre mâle > alors séduction de plusieurs femelles sans intérêt"). Ce comportement peut être modulé par celui de l'autre mâle en présence (je ne connais pas les détails des signes extérieurs d'agressivité chez ce poisson).
1- l'hypothese que je conteste est justement celle qui selon laquelle la preferee est celle qui est la plus courtisee en cas de monopole.
RépondreSupprimer2- le nouveau male s'il reste saura vite reconnaitre la valeur des femelles. Le soi-disant trompeur ne peut donc que gagner du temps durant lequel il aurait l'exclusivite des femelles... les moins bonnes? Allons bon!
La theorie de la tromperie me parait oiseuse. Celle de la preference marginale me parait simple et universelle.
Notons que mon explication, qui n'est qu'une application de la theorie du monopole, suppose aussi une forme de "tromperie", mais plus simple: c'est quand il a le monopole que le male "trompe" les femelles en cachant ses preferences: il courtise les marginalement plus attirante etant donne sa chasse gardee en leur faisant croire qu'elles sont ses preferees. Mais la concurrence le force a reveler ses vraies preferences (etant donnees ses vraies capacites) en courtisant celles qu'il prefere etant donne peut vraiment se permettre de garder.
RépondreSupprimerJe mets "tromperie" entre guillemets, parce que dans ma theorie, contrairement aux hypotheses alambiquees des chercheurs cites, il n'y a pas de tromperie, par quoi je designe proprement "une action dont le but recherche est different des consequences immediates visibles, mais consiste a induire un comportement parasitique errone chez un spectateur".
RépondreSupprimerDans la theorie du monopole, il n'y a tromperie a aucun moment. A tout moment, l'effort marginal de seduction designe, et sans tromperie aucune, non pas la preference absolue, mais l'esperance d'influence comportementale preferentielle. Si d'aucunes femelles vous sont toutes acquises (folles amoureuses, deja fecondees, accrochees a vos pheromones, prisonnieres de votre monopole), alors peu importe a quel point vous les preferez, vous n'avez aucun interet a les courtiser, elles sont deja a vous. Tandis qu'une autre, que vous pouvez moins aimer, ne vous est pas acquise - elle se defile a vos avances, prefere d'attendre l'arrivee hypothetique d'un nouveau pretendant, etc. C'est sur elle que vous concentrez vos efforts.
Vient effectivement le nouveau rival. Allez-vous continuer a courtiser cette belle elusive, ou allez-vous proteger celles qui vous etaient precedemment acquises, et qui menacent de changer de fournisseur de sperme? Allez-vous concentrer vos efforts sur deux tiens ou sur un tu l'auras? Je ne sais pas la reponse en ce qui vous concerne, mais entre deux repondeurs contradictoires, je sais lequel gagne le prix Darwin.
La tromperie, ce serait si le monopoleur voulait faire voter par ses femelles une loi pour "les" proteger de la concurrence etrangere.
Vous quitonnez contre les abstractions deracinees, je crois que cette theorie de la tromperie en est un exemple typique, cependant que la theorie du monopole est une theorie bien fondee s'appliquant universellement a tout comportement animal evolutionnairement stable.
Ce que vous appelez "influence comportementale preferentielle" revient à la tromperie (sous une forme guère moins alambiquée amha). Peu importe le mot, si vous expliquez qu'en présence d'un compétiteur mâle, tel comportement est plus intéressant qu'un autre, vous décrivez une stratégie de contournement du mâle en vue de maximiser la reproduction avec les femelles disponibles... ce que font les auteurs.
RépondreSupprimerPan sur mon bec.
RépondreSupprimerBon, histoire de ne pas etre QUE un con pretentieux, j'ai lu l'article en entier et d'autres informations sur le molly, plutot que le seul abstract, et j'avoue qu'effectivement, il ne s'agit pas de simple adaptation des preferences a la competition, mais qu'il y a un jeu ou l'opinion d'un autre poisson est en jeu. Mais la encore, rien n'etablit que le poisson a convaincre/manipuler soit le male rival plutot que la femelle preferee.
Ces poissons molly semblent etre un cas tres interessant et tres particulier. Tout d'abord, sous le mot "preference" de l'abstract se cache une difference tout a fait objective: certaines femelles "conspecifiques" porteront les rejetons du male, les autres, les "amazones" se clonent mais attendent le sperme d'un male pour cela (on se demande bien pourquoi en 1e5 generations elles ne se sont pas affranchies de ca). Les males ne sont pas dupes, et leur preference est tout a fait objective et systematique.
Le protocole n'etait pas l'introduction d'un nouveau venu dans un harem, mais l'opportunite de seduire les belles en presence ou absence d'un rival (prisonnier d'un tube transparent). Alors qu'en l'absence, le male prefere nettement la femelle conspecifique, il semble nettement porter ses efforts sur l'amazone en presence d'un rival. Mais bon, s'ils sont tous si malins et capables de distinguer les deux femelles, quelle tromperie y a-t-il?
La resource rare disputee ici n'est pas le nombre ou la qualite des femelle pour chacun, mais la limite nombre de spermes pour feconder la seule femelle disponible. Cf une autre etude du meme auteur principal:
http://www.pubmedcentral.nih.gov/articlerender.fcgi?artid=1626217
Il ne s'agit sans doute pas de tromperie, mais de signalling. La femelle semble aimer un male capable d'avoir encore du sperme en reserve apres avoir copule avec une autre femelle, y compris une amazone, arbitre neutre.
S'il n'a pas de rival, le male seul veut bien tenter d'impressioner la belle avec de telles galipettes, mais veut surtout la reproduction avec la belle desiree - qu'il obtient facilement en l'absence de rival.
En presence de rival, il a peut-etre plus d'efforts a fournir pour seduire la belle plus exigeante, grace a l'amazone. Il n'est pas etabli que l'autre male est susceptible d'etre trompe quant a la nature de l'amazone, ni quant a la quantite de sperme qu'il sacrifierait a la copulation avec celle-la.
Bref, ma theorie precedente ne s'applique clairement pas et tombe a l'eau, mais l'interpretation en terme de tromperie me semble toujours faible, et davantage justifiee par un effet de mode parmi les scientifiques que par une experience conclusive.
La tromperie chez les poissons me parait etre une de vos abstractions desincarnees. A moins que dans une inflation du terme "tromperie", il n'y ait plus a la clef une erreur induite chez autrui. Quel autrui, quelle erreur?
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Résultats 1 – 1 sur 1
Faré
homme
Faré, ma pauvre cervelle, malgré tous efforts, n'a pas réussi à vous suivre ni comprendre vos raisonnements sophistiqués. Sans doute parce qu'elle est constituée de la circuiterie neuronale d'une femelle.
"Mais profond est le cœur de l'homme...la femme pressent la force masculine, mais point ne la conçoit ... Et ainsi parla la petite vieille: Tu vas chez des femmes? N'oublie les étrivières!"(Ainsi parlait Z.)
En d'autre terme, en presence de concurrence entre males, le comportement des males se deplace vers les preferences des femelles. Tandis qu'en situation de monopole, le male a davantage de ce qu'il desire.
RépondreSupprimerFaré : "Mais bon, s'ils sont tous si malins et capables de distinguer les deux femelles, quelle tromperie y a-t-il?"
RépondreSupprimerParce que les mâles se copient :
Molly males are known to copy other males’ mate preferences and switch to Amazon mollies after they had seen another male associate with the heterospecific
female [24]. Generally, copying of mate-choice decisions is a widely reported phenomenon [25].