jeudi 28 août 2008
Corrélats neuraux du désir
Hideaki Kawabata et Semir Zeki ont demandé à 18 sujets japonais, dont neuf femmes, âgés de 20 à 48 ans, de regarder 432 images dans trois catégories (personnes, objets, événements). Les sujets devaient classer ces images sur une échelle de désirabilité de 1 à 10 (1 à 4 indésirable, 5 et 6 indifférent, 6 à 10 désirable). Dans le même temps, on observait leur cerveau en imagerie par résonance magnétique fonctionnelle. Il en ressort que la variation entre désirable et indésirable active essentiellement le cortex orbito-frontal, celle entre désirable et indifférent les cortex cingulaire médian et cingulaire antérieur. Outre ces activations neurales communes, chaque type de stimulus éveillait d’autres zones spécifiques (noyau accumbens, striatum, hypothalamus, etc.). Et des aires différentes et spécialisées du cortex visuel analysaient chaque type d’images. Le cortex cingulaire et le cortex orbito-frontal apparaissent donc comme deux zones de tri parmi les stimuli perçus, selon qu’ils éveillent ou non le désir de l’individu. L’étude peut être lue ici (PloS One).
mardi 26 août 2008
Une histoire de corne-cul...

Référence:
Parzner H.H. et A.P. Moczek (2008), Rapid antagonistic coevolution between primary and secondary sexual characters in horned beetles, Evolution, online pub., doi :10.1111/j.1558-5646.2008.00448.x
Illustration : Département de biologie, Université de l’Indiana.
mercredi 20 août 2008
Hyper-hétérosexualité et gènes gay : une nouvelle étude
Les gènes gay ont la côte en ce moment. En complément du travail récent de l’équipe d’’Andrea Camperio-Ciani que nous avions commenté ici, une nouvelle étude australo-américaine dirigée par Brendan P. Zietsch confirme le probable avantage hétérosexuel lié à certains gènes impliqués dans l’homosexualité. Les chercheurs ont ici examiné 4904 jumeaux homozygotes et hétérozygotes, auxquels ils ont fait remplir un questionnaire détaillé sur leurs attitudes et leurs comportements sexuels. Il en ressort que les femmes les plus masculines et les hommes les plus féminins ont une probabilité plus forte d’être homosexuel mais, lorsqu’ils sont hétérosexuels, ont un nombre moyen de partenaires plus élevé. De même, les frères ou sœurs hétérosexuels d’un jumeau / jumelle homosexuel(le) ont plus de partenaires que lorsque la paire est hétérosexuelle. L’analyse d’héritabilité suggère l’existence de gènes à « pléiotropie antagoniste » (effets divergents), qui favorisent tantôt l’homosexualité, tantôt l’hyper-hétérosexualité.
Référence :
Zietsch B.P. et al. (2008), Genetic factors predisposing to homosexuality may increase mating success in heterosexuals, Evol. Hum. Behav., online pub., doi:10.1016/j.evolhumbehav.2008.07.002
Référence :
Zietsch B.P. et al. (2008), Genetic factors predisposing to homosexuality may increase mating success in heterosexuals, Evol. Hum. Behav., online pub., doi:10.1016/j.evolhumbehav.2008.07.002
Asymétrie variable et attraction des corps (sexués)
L’asymétrie variable ( FA pour fluctuating asymmetry) est une mesure couramment utilisée depuis une trentaine d’années en biologie et écologie du comportement. Sur une population donnée, on analyse la face ou le corps des individus selon qu’ils divergent d’un axe de symétrie « idéale » séparant sur un plan vertical sa partie droite et sa partie gauche. L’asymétrie a été inversement corrélée à la capacité de l’organisme à résister à divers stress au cours de son développement (maladies, parasites, agressions, etc.). Une asymétrie élevée est associée à une morbidité et une mortalité accrue, une moindre fécondité, une locomotion moins performante et diverses autres variables liées aux sélections naturelle et sexuelle. Chez l’homme, diverses recherches l’ont également rapportée (toujours en association inversée) à l’attractivité d’une personne basée sur son odeur corporelle, sa voix, son visage ou sa grâce.
Dans ce travail, l’équipe de William M. Brown a réalisé une mesure entièrement robotisée, en scanner optique 3D, de l’asymétrie variable de 77 individus (40 hommes, 37 femmes). Outre que l’automatisation minimise le biais de mesure de l’expérimentateur humain, 24 traits différents répartis sur tout le corps hors visage ont été scannés, et cela plusieurs fois. À partir de ces données, les chercheurs ont reconstitué 77 images en 3D des corps, sans visage ni indicateur de peau. Ils ont demandé à 87 évaluateurs de noter ces corps reconstitués sur une échelle d’attractivité. Résultat : les corps présentant le plus haut niveau d’asymétrie ont été jugés les moins attractifs. L’équipe de Will Brown avait également mesuré sur les 77 individus « scannés » des traits connus pour être l’objet de préférences sexuelles ou de succès reproductif : ratio taille-hanche, volume de seins, longueur des jambes chez les femmes ; taille, largeur des épaules, rapport des jambes au torse chez l’homme. Ces traits de masculinité ou de féminité ont eux aussi été corrélés négativement au degré d’asymétrie. Les configurations articulaires moyennes des corps masculins ont également montré une association inverse, qui n’a pas été retrouvée avec les corps féminins.
Commentant ce travail, Will Brown observe : « Il est largement pressenti que les êtres humains sont attirés les uns les autres en raison de qualité génotypiques et phénotypiques – en d’autres termes, la recherche d’un partenaire qui donnera à celui qui le choisit une progéniture de plus haute qualité. Mes précédents travaux avaient suggéré que la symétrie du corps n’est pas nécessairement ce que les gens observent quand ils trouvent une personne attractive, mais que les traits physiques typiquement préférés peuvent néanmoins révéler la qualité développementale implicite d’un individu, qui se retrouve dans son degré de symétrie (…) Il semble que les asymétries corporelles étant trop subtiles pour être perçues à l’œil nu, l’évolution a produit des signaux et parades plus flagrants ».
Référence :
Brown W.M. et al. (2008), Fluctuating asymmetry and preferences for sex-typical bodily characteristics, PNAS, online pub., doi: 10.1073/pnas.0710420105
(Merci à Will Brown de m’avoir transmis son article).
Dans ce travail, l’équipe de William M. Brown a réalisé une mesure entièrement robotisée, en scanner optique 3D, de l’asymétrie variable de 77 individus (40 hommes, 37 femmes). Outre que l’automatisation minimise le biais de mesure de l’expérimentateur humain, 24 traits différents répartis sur tout le corps hors visage ont été scannés, et cela plusieurs fois. À partir de ces données, les chercheurs ont reconstitué 77 images en 3D des corps, sans visage ni indicateur de peau. Ils ont demandé à 87 évaluateurs de noter ces corps reconstitués sur une échelle d’attractivité. Résultat : les corps présentant le plus haut niveau d’asymétrie ont été jugés les moins attractifs. L’équipe de Will Brown avait également mesuré sur les 77 individus « scannés » des traits connus pour être l’objet de préférences sexuelles ou de succès reproductif : ratio taille-hanche, volume de seins, longueur des jambes chez les femmes ; taille, largeur des épaules, rapport des jambes au torse chez l’homme. Ces traits de masculinité ou de féminité ont eux aussi été corrélés négativement au degré d’asymétrie. Les configurations articulaires moyennes des corps masculins ont également montré une association inverse, qui n’a pas été retrouvée avec les corps féminins.
Commentant ce travail, Will Brown observe : « Il est largement pressenti que les êtres humains sont attirés les uns les autres en raison de qualité génotypiques et phénotypiques – en d’autres termes, la recherche d’un partenaire qui donnera à celui qui le choisit une progéniture de plus haute qualité. Mes précédents travaux avaient suggéré que la symétrie du corps n’est pas nécessairement ce que les gens observent quand ils trouvent une personne attractive, mais que les traits physiques typiquement préférés peuvent néanmoins révéler la qualité développementale implicite d’un individu, qui se retrouve dans son degré de symétrie (…) Il semble que les asymétries corporelles étant trop subtiles pour être perçues à l’œil nu, l’évolution a produit des signaux et parades plus flagrants ».
Référence :
Brown W.M. et al. (2008), Fluctuating asymmetry and preferences for sex-typical bodily characteristics, PNAS, online pub., doi: 10.1073/pnas.0710420105
(Merci à Will Brown de m’avoir transmis son article).
vendredi 15 août 2008
Homosexualité, bisexualité et « hyper-hétérosexualité »
L’homosexualité pose un problème intéressant pour la théorie de l’évolution. Par définition, seuls les traits avantageux d’un individu sont transmis à la génération suivante (s’ils ont une base génétique). Or, l’homosexualité ne peut pas être avantageuse de ce point de vue puisqu’elle n’aboutit justement pas à la reproduction. Donc, si l’homosexualité a une base génétique, elle aurait dû s’éteindre depuis longtemps face à la concurrence des gènes hétérosexuels par nature plus prolixes. Or ce n’est pas le cas, et de nombreux travaux convergent depuis trente ans pour observer qu’il existe une héritabilité de l’orientation sexuelle.
Comment résoudre ce paradoxe ? Plusieurs pistes ont été proposées. Edward Wilson, le père de la sociobiologie, avait suggéré que les homosexuels pourraient plus altruistes envers leurs parents hétérosexuels : à défaut de transmettre directement leurs propres gènes, ils aideraient ainsi indirectement à le faire en augmentant les chances de survie des apparentés (qui, par définition, possèdent en partie les gènes concernés). Mais des études ultérieures n’ont pas montré que les homosexuels sont en moyenne plus sujets à l’altruisme familial que les autres.
Une autre piste concerne la pléiotropie. Sous ce nom barbare se cache une définition assez simple : un même gène peut avoir plusieurs effets, et les effets positifs peuvent contrebalancer les effets négatifs. Exemple classique : le même gène qui provoque la drépanocytose (une maladie de l’hémoglobine) procure un certain degré de protection contre la malaria, selon qu’il est à l’état homozygote (un seul exemplaire, effet bénéfique) ou hétérozygote (deux exemplaires, effet délétère). Ce gène persiste donc dans les populations où sévit la malaria puisqu’il possède un avantage lorsqu’on possède un exemplaire unique venu de l’un de ses parents. Mutatis mutandis, il pourrait en être de même pour les gènes (sans doute nombreux) impliqués dans l’orientation sexuelle.
Sur le papier, cette hypothèse est intéressante. Mais que se passe-t-il dans la réalité ? La première preuve empirique du phénomène a été apportée en 2004, par une équipe italienne dirigée par Andrea Camperio-Ciani (Université de Padoue). Les chercheurs ont demandé à 98 homosexuels et 100 hétérosexuels mâles de remplir un questionnaire assez précis sur leur famille : frères et sœurs, cousins et cousines, oncles et tantes, grands-parents. Au total, ils ont obtenu des informations sur plus de 4600 personnes issues des lignées maternelles ou paternelles des sujets concernés. Résultat : les apparentés des lignées maternelles sont plus fécondes chez les homos que chez les hétéros, différence qui ne se retrouve pas pour la lignée paternelle. Exemple : les mères d’homosexuels ont en moyenne 2,69 enfants contre 2,32 ; les tantes maternelles 1,98 contre 1,51 ; les grands-mères maternelles 3,55 contre 3,39. Cet avantage systématique ne se retrouve pas dans les équivalents paternels, distribués de manière aléatoire. Conclusion des chercheurs : certains gènes qui prédisposent à l’homosexualité chez les hommes et qui sont transmis par lignées maternelles seulement confèrent une fertilité plus importante aux femmes.
La même équipe vient de publier dans le Journal of Sexual Medicine un nouveau travail appuyant son hypothèse. 239 individus mâles ont cette fois été étudiés, dont 88 exclusivement hétérosexuels, 86 bisexuels et 65 exclusivement homosexuels. Le point nouveau est l’introduction de la bisexualité, qui est rarement analysée dans la littérature scientifique. Comme dans le travail de 2004, les chercheurs ont observé que la fertilité des apparentées issus des lignées maternelles est plus importante chez les homosexuels et les bisexuels que chez les hétérosexuels. Les bi et les gays se situent au même niveau. La différence entre ces deux populations tient à ce que les gays ont plus souvent des frères aînés – un autre trait déjà connu, le nombre de frères aînés étant l’un des premiers prédicteurs de l’homosexualité mâle, sans doute pour des raisons d’épigénétique (empreinte maternelle lors de la grossesse).
Ce qui se dessine depuis ces travaux, c’est l’existence d’un ou plusieurs gènes liés au chromosome X qui entraîneraient une sur-attractivité pour les hommes, aussi bien chez les femmes (d’où la fertilité supérieure des apparentées de lignées femelles) que ches les hommes (d’où la bisexualité ou l’homosexualité). Le neurobiologiste Simon LeVay a qualifié ce trait d’hyper-hérétosexualité. La bisexualité en serait un produit dérivé. Et l’homosexualité serait elle-même une variante de la bisexualité, l’exclusivité de l’attrait pour les hommes étant due à d'autres gènes, à des causes environnementales et/ou à des facteurs épigénétiques.
Références :
Camperio-Ciani A. et al. (2008), Genetic factors increase fecundity in female maternal relatives of bisexual men as in homosexuals, J. Sex. Med., oline pub., doi : 10.1111/j.1743-6109.2008.00944.x
Camperio-Ciani A. et al. (2004), Evidence for maternally inherited factors favouring male homosexuality and promoting female fecundity, Proc. Biol. Sci., 271, 1554, 2217-21
Comment résoudre ce paradoxe ? Plusieurs pistes ont été proposées. Edward Wilson, le père de la sociobiologie, avait suggéré que les homosexuels pourraient plus altruistes envers leurs parents hétérosexuels : à défaut de transmettre directement leurs propres gènes, ils aideraient ainsi indirectement à le faire en augmentant les chances de survie des apparentés (qui, par définition, possèdent en partie les gènes concernés). Mais des études ultérieures n’ont pas montré que les homosexuels sont en moyenne plus sujets à l’altruisme familial que les autres.
Une autre piste concerne la pléiotropie. Sous ce nom barbare se cache une définition assez simple : un même gène peut avoir plusieurs effets, et les effets positifs peuvent contrebalancer les effets négatifs. Exemple classique : le même gène qui provoque la drépanocytose (une maladie de l’hémoglobine) procure un certain degré de protection contre la malaria, selon qu’il est à l’état homozygote (un seul exemplaire, effet bénéfique) ou hétérozygote (deux exemplaires, effet délétère). Ce gène persiste donc dans les populations où sévit la malaria puisqu’il possède un avantage lorsqu’on possède un exemplaire unique venu de l’un de ses parents. Mutatis mutandis, il pourrait en être de même pour les gènes (sans doute nombreux) impliqués dans l’orientation sexuelle.
Sur le papier, cette hypothèse est intéressante. Mais que se passe-t-il dans la réalité ? La première preuve empirique du phénomène a été apportée en 2004, par une équipe italienne dirigée par Andrea Camperio-Ciani (Université de Padoue). Les chercheurs ont demandé à 98 homosexuels et 100 hétérosexuels mâles de remplir un questionnaire assez précis sur leur famille : frères et sœurs, cousins et cousines, oncles et tantes, grands-parents. Au total, ils ont obtenu des informations sur plus de 4600 personnes issues des lignées maternelles ou paternelles des sujets concernés. Résultat : les apparentés des lignées maternelles sont plus fécondes chez les homos que chez les hétéros, différence qui ne se retrouve pas pour la lignée paternelle. Exemple : les mères d’homosexuels ont en moyenne 2,69 enfants contre 2,32 ; les tantes maternelles 1,98 contre 1,51 ; les grands-mères maternelles 3,55 contre 3,39. Cet avantage systématique ne se retrouve pas dans les équivalents paternels, distribués de manière aléatoire. Conclusion des chercheurs : certains gènes qui prédisposent à l’homosexualité chez les hommes et qui sont transmis par lignées maternelles seulement confèrent une fertilité plus importante aux femmes.
La même équipe vient de publier dans le Journal of Sexual Medicine un nouveau travail appuyant son hypothèse. 239 individus mâles ont cette fois été étudiés, dont 88 exclusivement hétérosexuels, 86 bisexuels et 65 exclusivement homosexuels. Le point nouveau est l’introduction de la bisexualité, qui est rarement analysée dans la littérature scientifique. Comme dans le travail de 2004, les chercheurs ont observé que la fertilité des apparentées issus des lignées maternelles est plus importante chez les homosexuels et les bisexuels que chez les hétérosexuels. Les bi et les gays se situent au même niveau. La différence entre ces deux populations tient à ce que les gays ont plus souvent des frères aînés – un autre trait déjà connu, le nombre de frères aînés étant l’un des premiers prédicteurs de l’homosexualité mâle, sans doute pour des raisons d’épigénétique (empreinte maternelle lors de la grossesse).
Ce qui se dessine depuis ces travaux, c’est l’existence d’un ou plusieurs gènes liés au chromosome X qui entraîneraient une sur-attractivité pour les hommes, aussi bien chez les femmes (d’où la fertilité supérieure des apparentées de lignées femelles) que ches les hommes (d’où la bisexualité ou l’homosexualité). Le neurobiologiste Simon LeVay a qualifié ce trait d’hyper-hérétosexualité. La bisexualité en serait un produit dérivé. Et l’homosexualité serait elle-même une variante de la bisexualité, l’exclusivité de l’attrait pour les hommes étant due à d'autres gènes, à des causes environnementales et/ou à des facteurs épigénétiques.
Références :
Camperio-Ciani A. et al. (2008), Genetic factors increase fecundity in female maternal relatives of bisexual men as in homosexuals, J. Sex. Med., oline pub., doi : 10.1111/j.1743-6109.2008.00944.x
Camperio-Ciani A. et al. (2004), Evidence for maternally inherited factors favouring male homosexuality and promoting female fecundity, Proc. Biol. Sci., 271, 1554, 2217-21
samedi 9 août 2008
Pédophilie et hébéphilie
Le manuel psychiatrique DSM-IV, qui fait actuellement autorité dans le domaine du diagnostic de la santé mentale, reconnaît la pédophilie comme un trouble du comportement sexuel. En vue de sa révision en DSM-V, une équipe de psychiatre canadien vient de suggérer l’introduction d’une distinction claire entre pédophilie et hébéphilie (paraphilie). Cette dernière renvoie à la préférence sexuelle pour les adolescents en phase pubertaire (11 à 14 ans). Les chercheurs ont réalisé des entretiens avec 881 mâles ayant soit des antécédents criminels, soit des troubles comportementaux catalogués comme pédophile. Ils ont assorti ces entretiens d’une mesure de l’érection pénienne face à des enfants d’âges divers. Il en ressort une distinction nette entre les individus attirés par les enfants prépubères et ceux séduits par les pré-ados ou les jeunes ados. D’où, selon eux, la nécessité de distinguer les deux troubles. Ou de créer un trouble de pédohébéphilie, avec trois sous-types : pédophile, hébéphile, pédohébéphile.
Un des problèmes posés par cette classification, c’est la désignation de l’hébéphilie comme paraphilie. On assiste dans les pays occidentaux à une avancée générale de la puberté depuis plusieurs générations (voir Expertise collective Inserm 2007, Évolution séculaire de la croissance et de la puberté), de sorte que le sexe biologique (capacité à procréer) est éventuellement en décalage avec le sexe psychologique (désir d’un partenaire sexuel) et le sexe socio-juridique (majorité sexuelle reconnue par le droit).
La puberté correspond à l’activation de la fonction hypothalamo-hypophyso-gonadique, aboutissant au développement complet des caractères sexuels, à l’acquisition de la taille définitive, de la fonction de reproduction et de la fertilité. Chez la fille, elle commence par le développement des glandes mammaires (en moyenne à partir de 10,5/11 ans), suivi de la pilosité pubienne et axillaire, des modifications de la vulve et des premières règles (ménarche), en moyenne autour de 13 ans. Leur date de survenue est considérée comme normale entre 10 et 15,5 ans. Du point de vue du droit, la majorité sexuelle est néanmoins fixée après la survenue moyenne cette puberté (15 ans en France, mais date variable selon les pays). Du point de la psychologie évolutionniste, la recherche d’un partenaire franchissant tout juste sa puberté paraît comme un trait normal du comportement sexuel masculin : cela maximise les chances que le partenaire en question soit vierge, donc qu'il reproduise ses gènes en cas de conception. Les mariages arrangés avec les enfants, et les consommations assez précoces par rapport à notre standard actuel, n’étaient pas si rares dans les siècles passés (le Code civil fixait initialement la majorité sexuelle à 11 ans) ni ne le sont dans certaines sociétés traditionnelles.
Si trouble psychiatrique il y a lorsque l’on parle d’hébéphilie, il devrait plutôt être centré sur la recherche compulsive de partenaires sexuels et l’usage de la contrainte pour parvenir à ses fins.
Référence :
Blanchard R. et al. (2008), Pedophilia, hebephilia, and the DSM-V, Arch. Sex. Behav., online pub., doi : 10.1007/s10508-008-9399-9
Un des problèmes posés par cette classification, c’est la désignation de l’hébéphilie comme paraphilie. On assiste dans les pays occidentaux à une avancée générale de la puberté depuis plusieurs générations (voir Expertise collective Inserm 2007, Évolution séculaire de la croissance et de la puberté), de sorte que le sexe biologique (capacité à procréer) est éventuellement en décalage avec le sexe psychologique (désir d’un partenaire sexuel) et le sexe socio-juridique (majorité sexuelle reconnue par le droit).
La puberté correspond à l’activation de la fonction hypothalamo-hypophyso-gonadique, aboutissant au développement complet des caractères sexuels, à l’acquisition de la taille définitive, de la fonction de reproduction et de la fertilité. Chez la fille, elle commence par le développement des glandes mammaires (en moyenne à partir de 10,5/11 ans), suivi de la pilosité pubienne et axillaire, des modifications de la vulve et des premières règles (ménarche), en moyenne autour de 13 ans. Leur date de survenue est considérée comme normale entre 10 et 15,5 ans. Du point de vue du droit, la majorité sexuelle est néanmoins fixée après la survenue moyenne cette puberté (15 ans en France, mais date variable selon les pays). Du point de la psychologie évolutionniste, la recherche d’un partenaire franchissant tout juste sa puberté paraît comme un trait normal du comportement sexuel masculin : cela maximise les chances que le partenaire en question soit vierge, donc qu'il reproduise ses gènes en cas de conception. Les mariages arrangés avec les enfants, et les consommations assez précoces par rapport à notre standard actuel, n’étaient pas si rares dans les siècles passés (le Code civil fixait initialement la majorité sexuelle à 11 ans) ni ne le sont dans certaines sociétés traditionnelles.
Si trouble psychiatrique il y a lorsque l’on parle d’hébéphilie, il devrait plutôt être centré sur la recherche compulsive de partenaires sexuels et l’usage de la contrainte pour parvenir à ses fins.
Référence :
Blanchard R. et al. (2008), Pedophilia, hebephilia, and the DSM-V, Arch. Sex. Behav., online pub., doi : 10.1007/s10508-008-9399-9
vendredi 8 août 2008
Confiance et méfiance faciales

Référence : Oosterhof N.N. et A. Todorov (2008), The functional basis of face evaluation, PNAS, online pub., doi: 10.1073/pnas.0805664105
(Pour les non-abonnés, le pdf de l'article peut être chargé sur cette page).
jeudi 7 août 2008
Bander plus, penser moins ?
On a fait grand cas du Viagra, Cialis et autres molécules d’érection médicalement assistée. Bander mieux, voilà l’important pour l’homme. Mais penser mieux, cela ne paraît pas très urgent. Ce qui ressemblerait à des molécules activant l’attention ou la concentration – cocaïne, amphétamine – a même été progressivement interdit au cours du siècle dernier. Et les étudiants, parfois leurs professeurs, en sont réduits à détourner des médicaments (comme la ritaline pour l’hyperactivité et déficit de l’attention) pour booster leurs performances mentales. C’est finalement assez étonnant : notre époque exerce une pression cognitive sur les individus comme aucune autre avant elle, mais elle semble indifférente à ce qui pourrait satisfaire cette pression en améliorant la mémoire et l’intelligence. Mais peut-être cette même époque est-elle surtout sensible aux demandes du marché : bander plus, penser moins, serait-ce l’adage du cœur de cible ?
mercredi 6 août 2008
La survie des plus similaires : personnalité et choix du conjoint
A l'opposé de l’adage populaire, les chercheurs ont observé que les contraires ne s’attirent pas spécialement. Les liaisons durables entre humains montrent plutôt une tendance à l’endogamie et l’homogamie, que l’on nomme assortative mating (appariement assorti). En règle générale, et par rapport à des unions qui se feraient totalement au hasard dans une population, les études de sociologie comme de psychologie ou de biologie concluent que les époux tendent à se ressembler par de nombreux facteurs : le milieu socio-économique, le niveau d'éducation, la race, le QI, la personnalité, la taille, les convictions morales et politiques.
Une étude menée sur 174 paires de vrais jumeaux, 148 paires de faux jumeaux, 322 couples, 563 amis avait quantifié ces similarités (Rushton et Bons 2005). Pour les personnes mariées, la plus forte corrélation concerne le travail (0,74), suivi par les idées politiques (0,60), le niveau d’éducation (0,55), le revenu (0,43), la religion (0,41). Les facteurs physiques (taille et poids) sont positivement corrélés, mais dans une moindre mesure (0,21 et 0,25), bien qu’ils aient une base génétique très forte. Les traits psychologiques comme l’extraversion ou la névrose sont encore moins associés chez les époux (0,06 et 0,01).
Ce dernier point relatif à la personnalité a cependant fait l’objet de résultats contradictoires : Beatrice Rammstedt et Jürgen Schupp se sont donnés pour objectif de le mesurer plus précisément à travers l’analyse de la personnalité de 6.909 couples allemands. Les chercheurs ont utilisé comme critère les « Big Five », c’est-à-dire les cinq traits de personnalité faisant l’objet d’un consensus en psychologie : ouverture à l'expérience (O), caractère consciencieux (C), extraversion (E), caractère agréable ou agréabilité (A), névrosisme ou neuroticisme (N), soit le modèle OCEAN. Leurs conclusions rejoignent celles de Rushton et Bons pour l’extraversion et l’instabilité émotionnelle (névrosisme), dont la corrélation est nulle pour les époux. En revanche, les trois autres traits montrent une corrélation positive moyenne de 0,30 ; et celle-ci a tendance à se renforcer à mesure que dure l’union (de 0,22 à 0,40).
L’assortative mating est intéressant car cette « discrimination spontanée » forme l’une des bases de la différenciation humaine dans l’évolution : même au sein d’une population pan-mictique (sans frontière géographique), le biais statistique en faveur de conjoints ayant des traits similaires aux siens renforce la probabilité que les descendants portent ces traits (s’ils sont héritables) et choisissent à leur tour des partenaires plutôt semblables. (Notons que le phénomène est cependant contrarié par une autre tendance statistique, la régression vers la moyenne des traits complexes). Du point de vue de cet assortative mating, le mariage moderne fondé sur l’amour (et non plus l’intérêt des familles) dans le cadre d’une mobilité individuelle et d’une communication interindividuelle accrues représente une expérience évolutive intéressante, dont il est bien sûr trop tôt pour tirer des observations. Vers quel équilibre partiel ou général tendra ce marché sexuel en cours d’émergence ?
Références :
Rushton P.J., T.A. Bons (2005), Mate choice and friendship in twins : evidence for genetic similarity, Psychol. Sci., 16, 7, 555-59.
Rammstedt B., J. Schupp (2008), Only the congruent survive – Personality similarities in couples, Personality and Individual Differences, online pub., doi:10.1016/j.paid.2008.06.007
Une étude menée sur 174 paires de vrais jumeaux, 148 paires de faux jumeaux, 322 couples, 563 amis avait quantifié ces similarités (Rushton et Bons 2005). Pour les personnes mariées, la plus forte corrélation concerne le travail (0,74), suivi par les idées politiques (0,60), le niveau d’éducation (0,55), le revenu (0,43), la religion (0,41). Les facteurs physiques (taille et poids) sont positivement corrélés, mais dans une moindre mesure (0,21 et 0,25), bien qu’ils aient une base génétique très forte. Les traits psychologiques comme l’extraversion ou la névrose sont encore moins associés chez les époux (0,06 et 0,01).
Ce dernier point relatif à la personnalité a cependant fait l’objet de résultats contradictoires : Beatrice Rammstedt et Jürgen Schupp se sont donnés pour objectif de le mesurer plus précisément à travers l’analyse de la personnalité de 6.909 couples allemands. Les chercheurs ont utilisé comme critère les « Big Five », c’est-à-dire les cinq traits de personnalité faisant l’objet d’un consensus en psychologie : ouverture à l'expérience (O), caractère consciencieux (C), extraversion (E), caractère agréable ou agréabilité (A), névrosisme ou neuroticisme (N), soit le modèle OCEAN. Leurs conclusions rejoignent celles de Rushton et Bons pour l’extraversion et l’instabilité émotionnelle (névrosisme), dont la corrélation est nulle pour les époux. En revanche, les trois autres traits montrent une corrélation positive moyenne de 0,30 ; et celle-ci a tendance à se renforcer à mesure que dure l’union (de 0,22 à 0,40).
L’assortative mating est intéressant car cette « discrimination spontanée » forme l’une des bases de la différenciation humaine dans l’évolution : même au sein d’une population pan-mictique (sans frontière géographique), le biais statistique en faveur de conjoints ayant des traits similaires aux siens renforce la probabilité que les descendants portent ces traits (s’ils sont héritables) et choisissent à leur tour des partenaires plutôt semblables. (Notons que le phénomène est cependant contrarié par une autre tendance statistique, la régression vers la moyenne des traits complexes). Du point de vue de cet assortative mating, le mariage moderne fondé sur l’amour (et non plus l’intérêt des familles) dans le cadre d’une mobilité individuelle et d’une communication interindividuelle accrues représente une expérience évolutive intéressante, dont il est bien sûr trop tôt pour tirer des observations. Vers quel équilibre partiel ou général tendra ce marché sexuel en cours d’émergence ?
Références :
Rushton P.J., T.A. Bons (2005), Mate choice and friendship in twins : evidence for genetic similarity, Psychol. Sci., 16, 7, 555-59.
Rammstedt B., J. Schupp (2008), Only the congruent survive – Personality similarities in couples, Personality and Individual Differences, online pub., doi:10.1016/j.paid.2008.06.007
lundi 4 août 2008
Hommes, femmes, intelligence
Les hommes et les femmes sont-ils aussi intelligents ? Le débat, qui a pu sembler clos par la psychométrie, est en fait régulièrement ré-ouvert par les psychométriciens eux-mêmes. Le problème est le suivant : les tests mesurant l’intelligence au sens de capacité cognitive générale (facteur g) sont construits pour minimiser les différences sexuelles, dont on sait qu’elles existent pour de nombreuses capacités cognitives spécifiques. Afin de parvenir à une moyenne commune et conventionnelle de 100 dans la population testée, les sous-tests s’adressant à ces capacités spécifiques à fort dimorphisme sexuel sont pondérés. Mais du coup, les tests étant conçus pour être neutres du point de vue du sexe, ils deviennent des indicateurs suspects quand on s’interroge sur la question particulière des différences sexuelles dans le domaine de l’intelligence.
Bryan J. Pesta et trois collègues se sont intéressés à des tâches cognitives élémentaires bien documentées dans la littérature, le temps d’inspection (IT) et le temps de réaction (RT). Elles mesurent la vitesse à laquelle les neurones traitent des informations. IT et RT sont connus pour être corrélés positivement à la capacité cognitive générale (environ 0.50 ans les méta-analyses). 218 hommes et 226 femmes ont passé ces tests, l’un consistant à voir deux lignes de longueur inégale et à désigner laquelle est la plus longue avec un temps d’exposition de plus en plus court, l’autre à voir deux S et un A et à indiquer le plus rapidement possible la position du A. Résultat : les hommes ont montré en moyenne de meilleurs résultats que les femmes, différence qui correspondrait, si on la rapportait aux échelles métriques d’intelligence à 3,9-5,7 points de QI. Un résultat compatible avec les conclusions de certains travaux antérieurs utilisant d’autres méthodologies (Jackson et Rushton 2006, Lynn et Irving 2008, mais voir conclusions opposées chez Camarata et Woodcock 2006, Keith et al. 2008). Les sujets de l’étude ne montraient pas de différences significatives dans un test d’intelligence générale qui leur fut administré (le Wonderlic Personnel Test).
Référence :
Pesta B.J. et al. (2008), Sex differences on elementary cognitive tasks despite no differences on the Wonderlic Personnel Test, Personality and Individual Differences, 45, 5, 429-431, doi:10.1016/j.paid.2008.05.028
(Merci à Bryan J. Pesta de nous avoir transmis son article).
Autres travaux cités :
Camarata S., R. Woodcock (2006), Sex differences in processing speed : Developmental effects in males and female, Intelligence, 34, 231–252.
Jackson D., J. Rushton (2006), Males have greater g: Sex differences in general mental ability from 100,000 17-to18-year olds on the scholastic assessment test, Intelligence, 34, 479–486.
Keith T., et al. (2008), Sex differences in latent cognitive abilities ages 6 to 59: Evidence from the Woodcock-Johnson III tests of cognitive abilities, Intelligence, sous presse.
Lynn R., P. Irwing (2008), Sex differences in mental arithmetic, digit span, and g defined as working memory capacity, Intelligence, 36, 226–235.
Bryan J. Pesta et trois collègues se sont intéressés à des tâches cognitives élémentaires bien documentées dans la littérature, le temps d’inspection (IT) et le temps de réaction (RT). Elles mesurent la vitesse à laquelle les neurones traitent des informations. IT et RT sont connus pour être corrélés positivement à la capacité cognitive générale (environ 0.50 ans les méta-analyses). 218 hommes et 226 femmes ont passé ces tests, l’un consistant à voir deux lignes de longueur inégale et à désigner laquelle est la plus longue avec un temps d’exposition de plus en plus court, l’autre à voir deux S et un A et à indiquer le plus rapidement possible la position du A. Résultat : les hommes ont montré en moyenne de meilleurs résultats que les femmes, différence qui correspondrait, si on la rapportait aux échelles métriques d’intelligence à 3,9-5,7 points de QI. Un résultat compatible avec les conclusions de certains travaux antérieurs utilisant d’autres méthodologies (Jackson et Rushton 2006, Lynn et Irving 2008, mais voir conclusions opposées chez Camarata et Woodcock 2006, Keith et al. 2008). Les sujets de l’étude ne montraient pas de différences significatives dans un test d’intelligence générale qui leur fut administré (le Wonderlic Personnel Test).
Référence :
Pesta B.J. et al. (2008), Sex differences on elementary cognitive tasks despite no differences on the Wonderlic Personnel Test, Personality and Individual Differences, 45, 5, 429-431, doi:10.1016/j.paid.2008.05.028
(Merci à Bryan J. Pesta de nous avoir transmis son article).
Autres travaux cités :
Camarata S., R. Woodcock (2006), Sex differences in processing speed : Developmental effects in males and female, Intelligence, 34, 231–252.
Jackson D., J. Rushton (2006), Males have greater g: Sex differences in general mental ability from 100,000 17-to18-year olds on the scholastic assessment test, Intelligence, 34, 479–486.
Keith T., et al. (2008), Sex differences in latent cognitive abilities ages 6 to 59: Evidence from the Woodcock-Johnson III tests of cognitive abilities, Intelligence, sous presse.
Lynn R., P. Irwing (2008), Sex differences in mental arithmetic, digit span, and g defined as working memory capacity, Intelligence, 36, 226–235.
vendredi 1 août 2008
Tromperie sexuelle chez le molly

Référence :
Plath M. et al. (2008), Male fish deceive competitors about mating preferences, Current Biology, online pub.
Illustration : FishBase (DR).
Inscription à :
Articles (Atom)