Le mythique point G a-t-il été découvert ? C’est ce que pense Emmanuele Jannini, chercheur à l’Université de L’Aquila (Italie). Le biologiste et son équipe avaient déjà identifié des marqueurs surexprimés dans les tissus situés entre le vagin et l’urètre, zone supposée du point G, notamment les familles PDEs (phosphodiestérases, des enzymes notamment responsables du métabolisme du monoxyde d’azote et de l’érection masculine). Jannini a sélectionné 20 volontaires, 9 femmes éprouvant régulièrement un orgasme vaginal, 11 n’en éprouvant jamais. À l’aide d’un scanner à ultrason, il a reconstitué la totalité de leur zone urétrovaginale en trois dimensions. Résultat : les parois de cet espace sont plus épaisses chez les femmes à orgasme vaginal que chez les autres. La région est riche en vascularisation et en innervation. Elle abrite les glandes de Skène, un équivalent tissulaire de la prostate masculine (probable résidu de la différenciation des tissus au cours de l’embryogenèse).
Depuis sa découverte par Ernest Gräfenberg en 1950 et sa popularisation dans les années 1980, le point G a fait couler beaucoup d’encre, et la communauté biomédicale est encore divisée sur son existence (cf Hines 2001 pour l’hypothèse négative). Au-delà de la vulgarisation bêtifiante (« Prenez votre pied en découvrant votre point G »), la question est tout à fait intéressante. On sait qu’un grand nombre de femmes n’éprouvent aucun plaisir particulier lors de l’acte hétérosexuel classique avec pénétration (environ une femme sur trois) et il semble que cette frigidité vaginale possède une solide base génétique (Dunn 2006). Ce sujet a même pris un tour politique voici quelques décennies, lorsque les féministes ont opposé le plaisir clitoridien, synonyme d’émancipation, au plaisir vaginal, expression du patriarcat. Il est tout à fait concevable que la mise en évidence des différences génétiques et anatomiques parvienne à réconcilier tout le monde à l’avenir, en montrant tout simplement que les voies de l’orgasme féminin diffèrent d’un individu à l’autre, et qu’elles sont assez impénétrables dans certains cas.
Pour l’avenir, ces travaux sont aussi le gage de modifications possibles de l’organisme. Si l’anorgasmie vaginale est mal vécue par une femme, elle aura peut-être le choix d’une intervention locale permettant d’instaurer une croissance nerveuse et vasculaire dans la zone urétrovaginale. Et inversement, les féministes radicales souhaitant couper les ponts et les tentations avec l’organe mâle pourront éventuellement s’atrophier le point G pour se consacrer à leur seul clitoris.
Références :
Dunn K.M. et al. (2005), Genetic influences on variation in female orgasmic function : a twin study, Biology Letters, Royal Society, DOI : 10.1098/rsbl.2005.0308
Gravina G.L. et al. (2008), Measurement of the thickness of the urethrovaginal space in women with or without vaginal orgasm, J. Sexual Med., online early pub., doi:10.1111/j.1743-6109.2007.00739.x
Hines TM. (2001), The G-spot: a modern gynecologic myth, Am. J. Obstet. Gynecol.,185, 2, 359-62
Illustration : Marlene Dumas, Two of the same kind, 1993, encre sur papier (Anthony Meier)
jeudi 21 février 2008
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