Les oestres sont des mouches dont les larves parasitent les chevaux, les taureaux, les moutons ou les humains à l’occasion. L’oestrus, dérivé du terme grec puis latin servant à les nommer, a pris un sens différent en biologie : il désigne la période féconde du cycle ovulatoire durant laquelle la femelle éprouve une excitation sexuelle et se montre réceptive à l’accouplement. On parle aussi des chaleurs.
Jusqu'à présent, on pensait que l’oestrus ne concerne pas la femelle humaine. Contrairement à de nombreux espèces où l’oestrus se manifeste avec la plus grande évidence, par des changements physiologiques et comportementaux, la femme semble cacher son ovulation et ne manifeste pas, sauf exception, de débordements érotiques visant à un accouplement rapide avec le premier mâle de passage. Et pourtant, Steven W. Gangestad et Randy Thornhill (Université d’Albuquerque) suggèrent dans leur récent papier de synthèse que cette croyance est erronée : il existe bel et bien un oestrus chez la femelle humaine dans sa période péri-ovulatoire.
Pour le montrer, les deux auteurs rassemblent les conclusions de 20 travaux menés entre 1991 et 2008 sur les modifications des préférences sexuelles des femmes au cours de leur cycle. Toutes ces recherches ont été menées sur des sujets ne prenant aucun contraceptif. Et toutes montrent un certain nombre de variations significatives : par exemple, les femmes sont plus sensibles aux effluves d’androstérone et de testostérone, aux traits masculins associés avec un haut niveau de ces hormones, au comportement dominant, aux voix, aux visages et aux corps jugés les plus masculins par leur groupe d’appartenance, à une taille élevée, à des traits faciaux ou corporels symétriques, à des odeurs corporelles et à leurs corrélations avec la proximité ou la distance génétique du système majeur d’histocompatibilité… A ces variations inconscientes de préférence en faveur des mâles supposés avoir de bonnes qualités génétiques de reproducteurs s’ajoutent diverses variations cognitives et comportementales : les femmes ont par exemple en moyenne plus de fantasmes (en pensée) en phase péri-ovulatoire et leurs fantasmes sont alors plus souvent orientés vers un autre homme que leur partenaire officiel. Chez ce dernier, on a d’ailleurs observé symétriquement une plus grande jalousie lors de la période féconde de leur partenaire, un plus grand empressement à les accompagner ou à prendre soin d’elles, une plus grande possessivité. Soit une co-évolution antagoniste assez classique.
Il faut donc s’y faire : même si leur visage, leur poitrine, leurs fesses ou leur vulve ne rougissent pas comme chez certaines de leurs cousines primates, les femmes (ou une certaine proportion d’entre elles) n’en connaissent pas moins des chaleurs. Un homme averti en vaut deux, n’est-ce pas ?
Référence :
Gangestad S.W., R. Thornhill (2008), Human oestrus, Proc. Roy. Soc. B., 275, 991-1000, doi : 10.1098/rspb.2007.1425
Illustration : Julia Roberts et Richard Gere dans le film Pretty Woman (1990) (DR). Toute interprétation sauvage d’un rapport de cause à effet entre la robe rouge d’une belle femme et la précieux cadeau d’un homme riche ne recevrait pas notre caution, bien sûr.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire